Asbjörn Ek

Asbjörn a la capacité d'être intangible, c'est-à-dire qu'il peut passer aux travers de n'importe quelle matière, solide ou liquide. Il peut également rentrer dans le sol lorsqu'il laisse l'entièreté de son corps intangible, mais une fois de retour à un état normal il est projeté en l'air car la masse de son corps ne peut coexister avec une autre. Cet effet l'empêche également de transpercer un corps humain bien qu'il puisse tout de même passer aux travers des gens. Le suédois ne craint pas les attaques physiques grâce à son pouvoir, et peut canaliser celui-ci dans certaines parties de son corps. La particularité de l'application de son pouvoir est qu'il perd souvent ses vêtements car il passe à travers.

Des traits délicats dessinent le visage fatigué d'un grand enfant, sculptant un nez fin et d'abyssaux yeux ternes et las. Le teint opalin, l'allure frêle ; on dirait une poupée usée. Deux orbes noires passent aux travers des mèches blondes et hasardeuses qui reviennent toujours s'échouer sur son front immaculé, résultat d'excentricité impulsive dont les racines noires témoignent. Tout en finesse, son corps s'allonge sous de rassurants tissus, dissimulant aux yeux curieux la dépendance qui ronge sa peau, gravures de la caducité qu'il a causée. Des tableaux d'encre épousent les courbes cassées de sa silhouette, contant ses pensées en nuances de gris. Svelte aux gestes félins, il glisse entre les formes de chair, discret.

Asbjörn est têtu et impulsif, difficilement stoppable dans ses idées. Il conclut trop vite certaines choses, et agit parfois sans réfléchir sous le contrôle de grandes émotions. Oui, il se laisse emporter par ses sentiments assez souvent, faisant contraste avec son comportement calme en société. Il est taquin avec les gens, aimant les exposer pour se moquer sans grande méchanceté.

Asbjörn est tout de même quelque peu lunatique, vivant des changements d'humeur assez brutaux et peu agréables pour ses vis-à-vis comme pour lui. Son importante consommation de drogues joue sur cet aspect, et en est très sûrement à l'origine. C'est également le facteur de son caractère un peu "dans la Lune" ; il décroche facilement des conversations.

Bien que le jeune suédois ait un sommeil conséquent et une capacité à s'endormir n'importe où, il répond toujours présent lorsqu'il est demandé, et reste efficace dans son travail.

Il est parti.

Il rentrait du lac gelé, les joues et le nez rosis par le froid. Il avait joué à chat toute l'après-midi avec ses camarades d'école, et pouvait se vanter de ne pas s'être fait attraper ! On lui avait appris à ne pas utiliser son pouvoir en public, mais son jeune âge pardonnait l'utilisation de son intangibilité lors d'un jeu enfantin. En passant le pas de la porte, il avait découvert sa maman les yeux emplis de larmes, qui serrait dans ses bras rassurants Berthold. Le regard perdu d'Asbjörn croisa celui éploré de sa génitrice, dans un silence perturbé par les sanglots de son frère aîné. Trois mots et une main tendue vinrent à lui.

"Il est parti."

Asbjörn était trop jeune pour comprendre l'impact de ce départ. Il pensait à un retour sous peu ; le lendemain ou le surlendemain, par exemple. Ce jour-là, il se contenta d'enlacer sa famille, persuadé que son papa reviendrait.

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Elle va bien.

Assis sur un vieux sofa miteux, sous la lueur d'une ampoule en fin de vie, Asbjörn confondait la fumée de sa cigarette et la condensation de son souffle chaud dans l'atmosphère glacée de ce squat excentré de Kiruna. Six appels manqués de son frère occupaient ses notifications, mais il n'avait pas l'intention de le rappeler. Il préférait profiter de l'instant avec ses amis, et se faire engueuler plus tard.

"amis", c'était un bien grand mot. Ils se retrouvaient pour partager quelques joints et avoir l'impression d'être moins seuls, mais ils étaient loin d'être de vrais amis. Asbjörn se pencha pour écraser son mégot dans le cendrier plein à craquer, et retomba avec lassitude contre le dossier de son fauteuil. Les cinq autres garçons parlaient entre eux, mais il était ailleurs. Il vit du coin de l'oeil l'écran de son téléphone s'allumer, et y prêta attention quelques instants. Son coeur prit un rythme saccadé une fois qu'il eut compris. Asbjörn se leva en trombe, son mobile en main, et sortit rapidement sans dire mot aux autres.

Le temps s'étirait ; il avait l'impression de courir si lentement. Le vent glacial lui griffait les joues, il butait contre le sol parfois, et venait même à tomber, mais c'était comme si son corps était instoppable. Il n'arrivait plus à penser correctement, il n'entendait plus et ne voyait plus, mais ses jambes le guidaient.
La vue qui s'offrait à Asbjörn lorsqu'il tourna sur sa rue le stoppa net : un véhicule des urgences était stationné devant sa maison. Il reprit sa course afin d'atteindre sa porte grande ouverte, mais un inconnu lui barra la route. Le jeune suédois tenta d'aligner des mots pour contester ce blocage, en vain, mais Berthold le rejoignit rapidement. Il perçut le regard perdu de son cadet, et lui adressa trois mots et une accolade.

"Elle va bien."

Peut-être que si son papa n'était pas parti, sa maman irait bien.

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Je pars, maman.

Asbjörn n'aimait pas l'hôpital de sa ville. Les murs étaient trop blancs, les couloirs étaient trop longs, le personnel trop intrusif, mais le pire était l'ambiance. Cette ambiance lourde. Car les hôpitaux donnaient vie et espoir, mais la mort pendait au-dessus de chacun comme une épée de Damoclès.

Il faisait le chemin qu'il ne connaissait que trop bien, jusqu'à ce que la porte de la chambre B17 se dresse devant lui. Il toqua deux fois, comme d'habitude, et attendit le moindre son d'approbation pour entrer. Le jeune homme prit la poignée qui était toujours aussi lâche, défaut de matériel, et appuya dessus afin de pénétrer dans la pièce. Toujours reliée aux nombreuses machines qui l'alimentaient, sa mère se tenait sur le lit, allongée, un roman entre les mains. Elle avait l'air fatiguée, et lui aussi.

"Je pars, maman."

Les iris bleutées que sa génitrice partageait avec son grand-frère prirent une lueur inquiète.

"Je m'envole pour Chicago demain matin, je pars vivre là-bas."

Elle le questionna sur ses motivations, l'avertit du danger de partir seul, lui répéta plusieurs fois des "Tu es sûr ?" tremblants, mais Asbjörn avait déjà pris sa décision ; une vie meilleure l'attendait là-bas.

C'est après une étreinte sincère qu'elle vit son plus jeune fils partir, incertaine de le revoir un jour.

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L'arrivée dans l'immense ville qu'était le nouveau Chicago ne se déroula pas comme le suédois l'avait imaginé. À vrai dire, il n'avait que très peu préparé son arrivée, n'ayant aucun plan pour dormir, et peu d'argent en poche. C'était un trop-plein d'émotions, mélange de colère, de tristesse et de déception, qui l'avait chassé jusqu'à la Ville des Vents.

Son stick coincé entre ses lèvres, il s'acharnait sur son briquet sûrement à court de gaz. L'abandon vint rapidement, et Asbjörn se contenta de continuer sa marche à la quête d'un feu. D'après la carte qu'il avait récupéré, il se trouvait à Highland Garden. L'environnement trahissait les moyens des habitants de ce quartier, offrant rues propres et jolis immeubles qui captivaient le regard curieux de l'expatrié. Il traversa toute la zone, admiratif, et son stick enfin allumé. C'est en arrivant à la limite d'Highland Garden qu'Asbjörn fut frappé par le changement flagrant de décor qui se dessinait quelques mètres plus loin. Les HLM qui se dressaient fébrilement au fur et à mesure de son passage donnaient une forte impression de précarité. Smallground n'avait pas volé sa réputation. Le jeune suédois s'arrêta au tournant d'une rue pour réfléchir à sa prochaine destination, projetant de trouver un petit job pour subvenir à ses besoins et quitter l'hôtel situé à Loughdale qu'il payait depuis déjà une semaine. Il fut coupé dans sa réflexion par l'entente de plusieurs coups de feu. Des cris retentirent au loin, et Asbjörn perçut au bout de l'avenue deux hommes poursuivis par un groupe armé. C'était la P.U.R.E. Asbjörn ne les avait jamais vus en action, il n'avait qu'entendu parler de leurs faits d'armes et du Mal perçu comme Bien qu'ils répandaient ; il s'était contenté de les observer patrouiller lorsqu'il sortait du lycée à Kiruna.
Il ne savait comment agir : se cacher ? fuir ? rester naturel ?